Les chiffres bleutés du réveil éclairent chichement ma table de chevet, je déchiffre difficilement l'heure tardive, mes yeux rougis par l'insomnie ne parviennent toujours pas à se fermer.
Par la fenêtre j'aperçois un morceau de ciel d'un noir profond parsemé d'éclats lumineux et laiteux. Le silence qui règne dans ma chambre n'est troublé que par le ronronnement de mon chat en manque de caresses et par le battement d'un volet mal fixé avec lequel joue le vent.
La fraîcheur de la nuit me fait frissonner, une peur qui tait son nom commence à s'insinuer en moi, je suis sur mes gardes.
Je m'appuie sur mon coude et pivote sur ma droite afin d'actionner l'interrupteur de la lampe Gordes qui projette alors une lumière infiniment douce.
Une ambiance subtile d'ombre et de lumière invente sur les murs de la pièce, des monts, des vallées, des villes silencieuses, des rivières muettes . . . Mon esprit embrumé et apeuré est rasséréné par cette douceur.
Mon persan, lui, n'est guère accessible à cette magie, le mouvement de mes pieds sous la couverture l'intrigue et l'excite, il se dresse un instant sur ses pattes arrière, comme suspendu, son regard est acéré comme ses griffes, soudain, il bondit, feint de planter ses crocs dans ma jambe, pousse un feulement de fauve puis se retourne sur le dos et me regarde. Il sait que l'angoisse m'étreint chaque nuit, il sait que je m'amuse de ses pitreries, il sait que sa douceur combat mes fantômes, il sait que leurs griffes m'effraient plus que les siennes, que leur silence est plus terrifiant que ses cris . . .
Le merveilleux félin se blottit tout contre ma poitrine, il plisse les yeux, esquisse un sourire, se retourne à plusieurs reprises pour trouver la position idéale puis, confiant,il s'assoupit.
Sa sérénité est contagieuse, rien ne peut m'arriver, la vie est simple, sa chaleur contre moi, le bruit de son coeur, rien ne peut plus m'arriver . . .
Peu à peu je sombre aussi dans le sommeil, j'éteins. Sous ma porte un trait de lumière s'évanoui, dans la chambre qui jouxte la mienne maman se rendort, la nuit se fait alors profonde et rassurante.
Demain le soleil brillera . . .
Laureline